Avé César! Polémique du monde canin…

Le groupe Québécor Média et l’équipe du magazine Animal ont publié un dossier sur la superstar d’Animal Planet : Cesar Millan. Inutile de vous dire que depuis sa sortie en kiosque, ce numéro du magazine Animal fait jaser les très nombreux amis des chiens du Québec… et outre-mer!

Que l’on soit pour ou contre César devient vite une guerre de clocher, sans queue ni tête. En effet, sans parler de nos amis d’outre-mer, on pourrait diviser le Québec en deux parties, les Bleus (pour) et les Rouges (contre). On est loin des petites guerres Montréal-Québec, Canadiens-Nordiques de mon adolescence!

On est plongé tout droit dans le monde absurde du rejet, de la discrimination et du racisme. On préfère porter des œillères, critiquer, juger et condamner… sans appel possible. Rien à faire, dans l’esprit des gens, il n’y aucune place à une amélioration possible du César d’il y a 10 ou 20 ans. Le anti-César est à nos portes et agressif! Et pourtant!!!

Après avoir rencontré César, après avoir lu ses livres (2 sont traduits en français, mais j’ai lu les autres livres en anglais), je vois une nette amélioration par rapport au César d’il y a 15 ans. Ces 10 dernières années, j’ai vu changer ce César tant pointé du doigt et condamné à perpétuité comme « abuseur » de chiens. Ses échanges, entre autre avec le Dr Ian Dunbar, ont porté fruit.

Suis-je pour ou contre César? Disons que je suis « violet », un mélange bleu et de rouge, c’est-à-dire ni pour ou contre à 100%. En ce moment, bien des langues se liguent contre moi en France, ainsi qu’au Québec, parce que soit disant je défends César et ses méthodes.
Quoi de neuf docteur?
Les gens qui me connaissent le savent, j’aime être l’avocate du diable… et comme une médaille a toujours 3 côtés…

JE CROIS…

Je crois que les méthodes et paroles de César ne sont pas toutes à rejeter du revers de la main sans autre explication.

Je crois très sincèrement que grâce à lui plusieurs chiens ont été sauvés de l’euthanasie. Déjà au Québec, les spécialistes en renforcement positif sont rarement à l’aise dans les cas d’agressivité canine et trop nombreux sont les chiens classés agressifs qui se retrouvent à l’abattoir sans raisons valables. Les chiens « zone rouge » trouve rarement preneur. Peu, très peu, de professionnels canins veulent prendre le temps de les rééduquer.

Je crois qu’effectivement trop de propriétaires aiment mal leur chien, ce qui se traduit par de nombreux problèmes de comportement.

Je crois au principe « exercice, discipline et affection.. dans cet ordre » de César, en ce sens que :

  • tout chien a besoin d’exercice physique adéquat pour être bien dans son corps et sa tête
  • tout chien a besoin d’être guidé et éduqué afin de respecter les règles de vie familiale et favoriser son intégration dans un environnement purement humain
  • tout chien a besoin de se sentir aimé et apprécié… sans abus d’affection, car l’abus affectif mène tout droit à la dépendance et l’anxiété

Je crois au « pouvoir de la meute », en ce sens que je vis quotidiennement dans ma maison avec plus de 12 chiens adultes de races différentes, d’âges différents et plein d’hormones depuis plus de 15 ans. Que je vois et constate, comment ils interagissent entre eux et comment ils gèrent les conflits, ainsi que l’éducation des chiots. Que j’observe leur langage et leur utilisation des signaux d’apaisement rendu populaire par Turid Ruugas, mais souvent mal interprétés par le novice.

Je crois que le chien est un canidé et qu’il ne sera jamais un mini-humain.

Je crois que si, moi-même, j’ai changé mon approche du chien et mes méthodes du tout au tout depuis mes débuts en amateur à l’âge de 9 ans et en professionnel à l’âge de 17 ans (1987)… tout le monde peut aussi évoluer et changer.

Je crois que le chien de compagnie possède son propre langage et que l’humain qui sait l’utiliser communiquera plus facilement avec lui.

Au final, je crois en ce l’un de mes mentors m’avait enseigné : « Dans le milieu du chien, tout le monde en parle. Parlez en mal, parlez en bien, mais parlez de moi. »
Ce qui veut dire qu’on ne peut jamais tout savoir. Que ce qui est publié, n’est que ce qu’on veut qu’il soit publié. Et aujourd’hui avec Internet… c’est tellement plus facile! Et n’oubliez pas qu’un show télévisé reste un show. On y montre ce que les gens veulent voir pour faire des dollars.

JE NE CROIS PAS…

Je ne crois pas qu’il faille utiliser la violence physique ou la punition excessive pour obtenir un résultat positif en éducation ou rééducation canine.

Je ne crois pas au concept de dominance traditionnel des années 1970’ où on préconisait le « moi Homme, toi Chien… toi faire ce que Homme dit! ».

Je ne crois pas au contrôle militarisé du chien, c’est-à-dire d’aboyer des ordres pour faire un super chien machine qui obéit à tout sans réfléchir… C’est possible pour un chien de travail (policier, militaire), mais pas dans un concept où le chien partage la vie familiale d’humains et doit s’y intégrer.

Alors?

Si on veut jeter la pierre à César, pourquoi ne pas aussi la jeter à d’autres personnalités connues du domaine animalier comme par exemple… Lorenz et Pavlov?

  • Saviez-vous que Konrad Lorenz travaillait pour Hitler quand il a développé son idéologie éthologique du loup versus le chien? Que c’est grâce à lui si Hitler avait développé un régime militaire basé sur la hiérarchie du loup, selon la vision Lorenz?
  • Saviez-vous que Pavlov gardait les chiens attachés en station debout dans des caissons pendant des semaines, avec un tube branché constamment dans leur gueule? Que c’est un de ses étudiants qui, par hasard, a trouvé la relation entre la cloche et la salivation?
  • Saviez-vous que l’entraînement en renforcement positif n’a pas été inventé au XXème ou XXIème siècle…mais qu’il existait déjà dans les années 1600? Non? Bien, revenons à César et ses principes…

À bien y penser… que veulent dire les mots dominance, contrôle et soumission?

Dominance, du latin dominus, qui veut dire maître ou maestro. Je suis maître de chiens donc dominante? Je suis leur leader, leur guide donc leur maestro? Oui, je suis leur maestro parce que je les guide, leur enseigne et je coordonne les membres de ce groupe familial avec qui je vis pour éviter les conflits majeurs, tout comme le ferait un animateur Scout avec un groupe d’adolescents manquant de contrôle de soi.

Avoir du leadership, est-ce avoir du contrôle (de soi, de ses émotions, de l’environnement)? Si oui, alors je « contrôle » mes chiens.

Soumission, si ce terme désigne un chien couché sur le dos, ventre dégagé et anxieux… alors non. Mais selon la définition de César qui est celle où le terme soumission désigne un chien calme, à mon écoute, ouvert à apprendre et sûr de lui sans bousculade…. alors oui mes chiens sont soumis et j’enseigne aux gens comment obtenir un chien dans cet état de calme et d’ouverture d’esprit.

En conclusion :

  • Qui suis-je pour jeter la première pierre à César ou à tout autre professionnel canin?
  • Qui suis-je pour prétendre être meilleure que tel ou tel professionnel canin?
  • Qui suis-je pour penser que César à tort dans tout ce qu’il fait?
  • Qui suis-je pour prétendre que tel ou tel éthologue, psychologue ou biologiste a enfin LA bonne réponse en ce qui concerne le chien?

Je suis assez humble pour dire ceci… seul le chien connait les vraies réponses. Et, peu importe la méthodologie, si le but est de sauver la vie d’un chien et de faciliter la relation entre le propriétaire et son chien, César et moi sommes comme bon nombres d’autres professionnels canins, car nous travaillons tous en ce sens.

Laissons tomber cette guerre des mots. Les termes sont ce qu’ils sont : dressage, éducation, dominance, respect, contrôle…
Le chien est dressé parce qu’il associe des mots à des actions (assis, couché).
Le chien est éduqué parce qu’il apprend les règles de vie humaine (où faire pipi, ne pas accueillir les gens en sautant sur eux).
Le chien est guidé par son propriétaire tel un maestro, un guide ou un leader.
Le chien est respectueux de l’environnement dans lequel il vit (ne détruit pas, ne gruge pas le mobilier) et des règles de la maisonnée.
Le chien apprend à s’autocontrôler…car sans autocontrôle, il devient vite incontrôlable et anxieux.

Suis-je pour ou contre César? Telle est la question!
Je ne peux ni être contre, ni être pour à 100%…

Il n’existe aucun professionnel qui a développé LA méthode universelle qui fonctionne avec tous les chiens et en toutes circonstances.

Il n’existe aucun accessoire, aucune méthode qui soit universelle, fonctionnant avec tous les chiens et dans toutes circonstances sans exception.

Félicitations au magazine Animal pour leur dossier sur le personnage Cesar Millan. Il fallait plus que de l’audace pour oser plonger dans l’eau bouillante comme ça… et, contrairement à ce que certains prétendent, il ne s’agit pas d’un manque crédibilité de votre part, mais une preuve d’ouverture d’esprit.

P.S. À tous ceux et celles qui feront aller allègrement leurs doigts sur le clavier pour prétendre ceci ou cela…. En ce qui me concerne je sais qui je suis, d’où je viens et où je vais.

J’entraînais en méthode à renforcement positif bien avant la popularisation du clicker au Québec par Jacinthe Bouchard. Contrairement à certains, jamais je ne renierai mes débuts dans le merveilleux monde canin.

Dans les années 70’ et 80’, les méthodes étaient souvent brusques et sans réel respect du chien, mais j’ai changé. Jamais je n’ai fait l’autruche ou l’hypocrite quant aux méthodes que j’utilise. Je n’écris pas « méthodes douces et sans violence » dans mes publicités, pour ensuite me cacher derrière un mur afin de « casser » le chien comme ça se fait dans bien des centres canins au Québec.

J’ai commencé à changer mes méthodes de travail avec le chien en 1987, parce que j’appliquais des techniques équestres avec les chiens. Et en 1991, quand un maître-chien très connu de Montréal m’avait dit de mettre ma première chienne Eurasier dans un congélateur, parce que ce n’était pas un vrai chien, ce fut définitif. Dès cet instant, j’ai eu la conviction qu’il y avait une autre voie à suivre… et c’est cette voie que je suis depuis ce temps. La voie du lien entre l’humain et l’animal, que ce soit dans la rééducation d’un cheval ou d’un chien.

Publié le 26 mars 2014 sur johanneparent.over-blog.com

Auteur : Johanne Parent