Les voisins ont peur de lui…

Rex est un Berger Allemand âgé de 5 mois, issus d’une maman de lignée d’exposition et d’un papa d’une lignée de travail. D’un bon gabarit pour son âge, Rex sera certainement hors standard, c’est-à-dire que sa taille sera plus grande que ce qui est écrit dans le standard de la race. Sa voix est puissante. Son ossature solide. Il deviendra surement un beau spécimen.

Sa propriétaire qui l’adore vit le rejet et la critique de ses pairs. Il fait peur! Il est agressif! Il est imposant! Il jappe tout le temps! Bref, Rex ne fait pas l’unanimité des gens autour de lui.

L’élevage d’où il vient a commis une faute grave pour son développement psychologique puisqu’il fut sevré trop tôt et adopté dès l’âge de 6 semaines. Sachant qu’un chiot a besoin de sa mère et de sa fratrie jusqu’à l’âge minimal de 7 semaines, Rex a manqué le bateau.

Il a créé un hyper attachement envers sa maman d’adoption. Il vocalise dès qu’il est laissé seul, se sentant abandonné par elle. Il réagit au moindre bruit par un aboiement bien ponctué. Malgré les efforts incontestables de sa propriétaire pour le socialiser, Rex demeure hésitant avec les inconnus. De nature curieuse, il veut dire bonjour, puis au dernier moment, l’hésitation prend place et il claque des dents. Avec les chiens, il veut jouer. Utilisant parfois sa voix avec un peu trop d’enthousiasme, certains chiens ont peur de ce gros pataud. Leur peur peut engendrer une réplique de la part de Rex, mais sans aucune gravité jusqu’ici. Rex est un jeune adolescent maladroit qui ne pense qu’à jouer.

Faut que jeunesse se fasse.

La patience de son entourage est mise à rude épreuve, mais Rex apprends et mature tout doucement. Il a besoin de stabilité, de calme, de constance. Inutile de crier, de frustrer ou de menacer. Tout vient à point à qui sait attendre. Un chien, particulièrement un chiot exubérant et actif comme Rex, ne s’éduque pas en 3 jours. Il faut des mois de patience et de répétition pour en arriver à un résultat plus qu’acceptable.

Trop de chiens sont abandonnés chaque année sous de faux prétextes, tout simplement parce que les propriétaires en ont marre de cette adolescence canine. L’achat d’un chiot implique nécessairement un investissement majeur en temps et en énergie pour l’éduquer afin qu’il devienne un adulte équilibré.

Dans le cas de Rex, c’est l’entourage familial et le voisinage qui manque royalement de patience et de compréhension. C’est plate à dire comme ça, mais au Québec, les gens sont en général peu tolérant face aux chiens. On aime les caresser dans les expositions et les salons d’éleveurs. On les trouve beaux et fins, mais dès que le voisin a un chien qui jappe… on déteste ce chien. Fermez-lui la gueule! Vite un collier anti jappement! Vite, vite, vite, sinon abandon ou euthanasie!!!! On veut pouvoir régler le problème en 3 minutes et ne plus en entendre parler.

Du coup, les propriétaires de chiens subissent la pression et la frustration de leurs pairs. Le chien n’est pas un humain que l’on peut raisonner. D’un point de vue purement émotionnel et psychologique, le chien est un enfant de 4 à 5 ans maximum. Il agit et réagit émotionnellement comme un enfant. Il vit l’abandon, la joie, le plaisir et toute une gamme d’émotions qui peuvent aussi lui causer du stress. Ce stress enclenche l’anxiété. L’anxiété nuit au bien-être du chien, ainsi qu’à sa santé physique et psychologique.

Pour être équilibré, le chien a besoin de consignes claires, d’encadrement, de respect, de stabilité, de constance… N’importe qui deviendrait fou dans un environnement instable où chacun cri à l’autre pour obtenir ce qu’il veut et où chaque minute apporte son lot d’imprévus.

Rex est un exemple comme tant d’autres chiens qui ont croisé mon chemin au fil des ans. Si je vous parle de Rex, c’est pour vous faire réfléchir… Un chien s’éduque et cette éducation débute avant sa naissance en choisissant des parents équilibrés. L’éleveur a ensuite la responsabilité de contribuer au développement optimal de ses chiots en débutant leur socialisation et en respectant leurs besoins psychologiques et émotionnels de contact quotidien avec la maman et la fratrie jusqu’à l’âge minimal de 7 semaines. Ensuite, le propriétaire a le devoir de continuer cette socialisation et cette éducation pendant toute la première année de vie du chien, et toutes les années qu’il partagera avec lui par la suite.

« Tu es responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé. » Le Petit Prince

Vous voulez faire de l’élevage? Vous voulez avoir un chien de compagnie ou de travail? Vous devez prendre vos responsabilités, socialiser et éduquer. C’est comme ça et uniquement de cette façon qu’on pourra faire en sorte que les chiens comme Rex ne soient plus une majorité, mais une minorité. Les problèmes de comportement, particulièrement ceux menant à des démonstrations agressives et des peurs extrêmes, ont souvent leur source programmée dès la petite enfance par un élevage inadéquat.

Avant d’acheter un chien, assurez-vous que l’éleveur sait ce qu’il fait et que votre chiot sera bien préparé à sa future vie de chien de compagnie. Évitez de le surprotéger et de le cajoler comme un bébé. Un chiot deviendra ce que vous ferez de lui. Plus vous le traiterez en bébé, moins il sera équilibré. Un chien reste un chien.

Publié le 27 juillet 2015 sur johanneparent.over-blog.com

Auteur : Johanne Parent